Contraintes de la matérialité sur les sciences de l’esprit

À propos de Imre Szeman et Dominic Boyer (dir.), Energy Humanities: An Anthology, 2017

Rafael Armando Aguirre Ponce

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Rafael Armando Aguirre Ponce, « Contraintes de la matérialité sur les sciences de l’esprit », Lectures anthropologiques [En ligne], 5 | 2019, mis en ligne le 13 février 2024, consulté le 19 avril 2024. URL : https://www.lecturesanthropologiques.fr/663

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Compte rendu de Szeman Imre et Boyer Dominic (ed.), 2017, Energy Humanities: An Anthology. Baltimore, Johns Hopkins University Press.

Imre Szeman et Dominic Boyer étudient depuis deux décennies les aspects culturels des systèmes énergétiques contemporains. Cette anthologie s’inscrit dans la continuité des précédentes publications de Szeman et du groupe d’études sur les pétrocultures de l’Université d’Alberta (Szeman et al. 2017, Wilson et al. 2017), et aussi de l’intérêt philosophique de Boyer pour la critique du pouvoir dans le domaine de l’énergie (Howe et al., 2015)1.  

Szeman et Boyer sont tous les deux les promoteurs des humanités de l’énergie, un domaine d’études qui, à l’instar des humanités médicales et numériques, vise à dépasser les frontières traditionnelles entre les disciplines d’une part, et entre la recherche académique et la recherche appliquée d’autre part. Répondant aux préoccupations grandissantes du public concernant le changement climatique d’origine anthropique et la non-durabilité des combustibles que nous utilisons pour alimenter notre société moderne, les humanités de l’énergie soulignent la contribution essentielle que les approches et méthodes humanistes peuvent apporter aux domaines de l’analyse qu’on croyait dévolus aux sciences naturelles.

Dans le présent volume, Szeman et Boyer ont compilé un ensemble d’articles et d’extraits d’essais littéraires, de poèmes et témoignages qui, selon moi, devraient être lu avec attention par l’ensemble des étudiant.e. s en sciences humaines et sociales. Arguant que les dilemmes actuels en matière d’énergie et d’environnement sont fondamentalement des problèmes d’éthique, d’habitudes, d’imagination, de valeurs, d’institutions, de croyances et de pouvoir — des domaines de compétence traditionnels des sciences humaines et sociales — l’ouvrage s’attache à montrer la complexité des problèmes auxquels le monde est confronté. Organisé en quatre sections — « énergie et modernité », « pouvoir et politique », « philosophie » et « esthétique » —, il aborde un large spectre thématique et épistémologique.

J’ai lu cette anthologie avec l’objectif de mieux comprendre comment les sciences humaines et les arts traitent des défis posés par l’Anthropocène, un terme proposé par le Prix Nobel Paul Joseph Crutzen et le spécialiste des sciences de la mer Eugene Filmore Stoermer pour caractériser l’influence de l’humanité contemporaine sur la planète en général et la géologie en particulier, faisant ainsi de l’humanité une nouvelle force géologique (Chakrabarty p. 40). 

Cette anthologie se caractérise par un équilibre entre des textes relevant de l’histoire de la pensée et ceux traitant de la géologie appréhendée comme une matérialité de l’histoire. Bien que les travaux portant sur la modernité industrielle euroaméricaine et le pétrole prédominent, l’anthologie examine de manière critique les institutions économiques et politiques ainsi que leurs conséquences depuis l’origine des civilisations jusqu’à nos jours. L’ouvrage se caractérise par la convergence entre une pensée critique du pouvoir politique, de la modernité et du capitalisme industriel, et un esprit du temps annonciateur de la fin ou du moins, de la transformation radicale de ces institutions. 

Il est remarquable que la conscience philosophique de l’Anthropocène survienne alors même que, depuis plus d’un siècle, on ironise et détruit — pour de bonnes et de mauvaises raisons — les possibilités de l’humanité à croire en elle-même — un problème particulièrement commenté par Chakrabarty dans sa contribution : « The climate of history : four theses » (p. 32-54) —, et que la pensée philosophique et les sciences humaines se heurtent à un sentiment de doute. Autrement dit, la civilisation a plus que jamais besoin d’une transformation technologique et sociale pour rompre avec sa dépendance aux carburants fossiles ; la civilisation a encore plus besoin de la vigueur optimiste des Lumières — une aspiration qui trouve un écho dans l’article de Margaret Atwood intitulé : « It’s not climate change: it’s everything change » (p. 139-150) —, bien que le pessimisme éclairé soit un point commun implicite des textes de cette anthologie.

L’énergie, envisagée au sens littéral, est un moteur de la reconfiguration des relations humaines. Le changement climatique, caractéristique de l’Anthropocène, est lui une menace pour la civilisation et les systèmes économiques et politiques actuels. Aussi, bien que la transition énergétique ne soit pas aussi rapide qu’il le faudrait pour répondre aux enjeux climatiques, l’ampleur et le rythme des transformations en cours ont de profondes implications politiques et éthiques. C’est pourquoi les sciences humaines, y compris les arts, sont encouragées à élargir le débat sur la politique énergétique (Castree et al. 2014), et cette anthologie offre un répertoire ambitieux de lectures de la situation actuelle. 

Dans ce compte rendu critique, j’ai sélectionné quelques-uns des textes présentés, en accordant une attention particulière à la question de la responsabilité humaine. En effet, si nous voulons véritablement réfléchir à l’impact de notre société sur la nature, nous devons prendre au sérieux la matérialité des sociétés, les contraintes actuelles et futures entourant les systèmes énergétiques et leurs transformations prévisibles lesquelles se situent au croisement du social et du matériel. Pour cela, il est nécessaire d’appréhender l’énergie depuis sa production jusqu’à son utilisation d’une part, et de ses origines : solaire, nucléaire et biotechnologique d’autre part. Il est également nécessaire de comprendre et d’évaluer les formes particulières de circulation de l’énergie dans la société à travers des réseaux d’échanges complexes dont doit tenir compte la critique du pouvoir et de la morale (Ferguson 2017).  

À l’aube de l’Anthropocène, l’humanité serait culturellement, philosophiquement, économiquement et politiquement en passe de réaliser une révision majeure des idéaux, des croyances et des formes de vie, mais, comme le rappellent plusieurs chapitres de l’ouvrage (Atwood, Chakrabarty, Oreskes et Conway, Szeman, principalement), la dépendance économique structurelle à l’égard des hydrocarbures et une gestion non durable de l’agriculture et de la forêt n’augurent pas d’une résolution réussie de la crise du changement climatique.

La thèse centrale de ce compte rendu est qu’un examen attentif des multiples configurations et restrictions des bases matérielles des systèmes énergétiques bénéficierait à l’analyse de la dimension culturelle de ces systèmes. La matérialité est ici appréhendée comme une contrainte critique de l’action et par conséquent, de la responsabilité humaine. Ce texte est organisé en cinq sections. La première et la dernière, plus philosophiques, revisitent le problème de la responsabilité humaine, une question centrale quand les potentialités destructrices du changement climatique semblent écraser toute possibilité de donner un sens à la responsabilité individuelle et politique. Les trois sections intermédiaires de ce compte rendu explorent des aspects de la matérialité des systèmes énergétiques et leurs relations avec la culture (ou, plus précisément, aux approches possibles de la culture). Ces trois sections traitent de la complexité économique et sociale liée aux carburants fossiles, de l’importance des réseaux (d’échange et de transport) et des liens fondamentaux entre la culture et les lois de la thermodynamique.

La responsabilité humaine  

L’Anthropocène — et plus particulièrement les usages et les conséquences physiques des systèmes énergétiques développés depuis la fin du XIXe siècle — pose un problème éthique majeur que cette anthologie aborde au prisme de la responsabilité, analysée à travers les grandes structures historiques et économiques. Dipesh Chakrabarty (op.cit.), Mitchell (p. 157-183), Mouhot (p. 205-219) et les deux éditeurs de l’ouvrage (p. 1-6) postulent l’impuissance de la responsabilité humaine lorsqu’elle se heurte à des forces comme le capitalisme, appréhendé comme forme historique fondamentale de la civilisation occidentale. Adoptant un point de vue décalé, Jamieson (p. 389–399) reconnaît les limites très insatisfaisantes de la responsabilité individuelle à l’Anthropocène, quand pour Morton, dans son chapitre : « A quake in being » (p. 357–372), la question de la responsabilité humaine se dilue dans l’impossibilité ultime de la connaissance. Pour ce philosophe, dont les recherches se situent à l’intersection de la pensée ontologique orientée sur l’objet et de l’écologie, les hyperobjects2 ces entités contenues dans une étendue spatio-temporelle telle qu’elles mettent en faillite l’idée même que nous nous faisons d’un objet — témoignent du flou persistant entre les différents domaines de la connaissance. Aussi, afin de réapprendre à penser le monde, c’est d’abord notre place au sein de celui-ci qu’il nous faut réévaluer en abandonnant le point de vue anthropocentré, qui nous conduit à croire que tout ce qui existe est forcément à notre mesure.  

Morton (ibid.) émet l’hypothèse qu’une explication du présent n’est pas possible. Autrement dit, les phénomènes tels que le changement climatique doivent être problématisés à un autre niveau de réflexion : « Quel sens cela a-t-il dans le cadre d’une prise de conscience écologique naissante ? Cela signifie que les humains ne sont pas totalement responsables de l’attribution de sens et de valeur à des évènements qui ne peuvent pas être mesurés statistiquement » (p. 367). La confiance en la raison, dans un contexte de défi lié au changement climatique, est à entendre comme la confiance en la capacité humaine à agir et à corriger la marche de la civilisation vers son effondrement. Morton (ibid.) met cependant en doute cette capabilité en soulignant le caractère faible, voire même illusoire de la raison : l’abstraction (ou corrélation) au sens de Morton se réfère à un paradigme dominant de pensée ne permettant pas de donner un sens à la réalité ou à l’objet en jeu. La raison ne peut donc pas résoudre les problèmes humains et la solution ne peut être basée sur le « monde de vie : le monde humain dont les hommes […] ont une compréhension préréflexive et en font l’expérience, par distinction avec une représentation scientifique du monde théoriquement fondé » (Alheit 2019 : 120). Cependant, Morton ne répond toutefois pas à la question de la nécessaire connaissance, même limitée, des effets du capitalisme pour engager la responsabilité de l’action humaine. 

L’Anthropocène bouleverse également la compréhension de l’éthique et de la morale. Dans sa contribution intitulée « Ethics for the Anthropocene » (op. cit.), Jamieson explique que, l’éthique est l’expression d’une interrogation sur le proche. Il réfute l’idée d’une morale abstraite et systématique et par là, les caractéristiques de la morale des Lumières : la « pureté, le caractère volontaire, l’inévitabilité et la généralisabilité (generalizability) (p. 389). En cela, la théorie de Jamieson rejoint les prémisses aristotéliciennes de MacIntyre (1984), qui postule que l’éthique du possible est axée sur la recherche du sens à donner aux variations d’une vie responsable. La vertu dépend du contexte de l’action. Que se passe-t-il lorsque ce contexte échappe à la compréhension humaine ?  

Aucun espoir de conquête de la félicité, idéal central de la philosophie des Lumières, n’est présent dans cette conception de l’éthique. Si l’individu peut comprendre les conséquences de ses actes et agir en conséquence, cela n’empêchera pas la catastrophe d’advenir si les actes d’autres personnes ne changent pas. Dans le texte de Jamieson (op. cit.), le respect d’une nature constitutive de notre identité permet de décentrer la production d’une nouvelle forme d’attention qui n’éloigne pas cependant l’inévitabilité. Il s’agit d’une conception de l’éthique soucieuse de changer l’homme, à défaut de pouvoir changer l’économie et ses conséquences destructrices sur l’environnement (p. 395). La décentration appelle à la valorisation de la nature sociobiologique de l’éthique et de la pensée. Ce faisant, Jamieson vante l’amour de la vie et des autres êtres vivants.

Si Morton (op. cit.) pose la nécessité de penser grand pour mieux repenser nos modes d’action, Jamieson reste quant à lui dans la sphère immédiate de l’individu. Dans sa seconde encyclique Laudato Si, publiée en 2015 et partiellement reproduite dans l’anthologie recensée (p. 304-309), le Pape François écrit qu’il est impératif de développer une éthique qui garantira l’efficacité d’une action fondée sur la matérialité, les contraintes physiques et leurs enchevêtrements avec les institutions. Ces points sont développés dans les sous-parties suivantes.

L’omniprésence du carbone et les fondements de l’abondance matérielle

Bien que d’usage récent à l’échelle de l’histoire, le pétrole a transformé notre rapport au monde, à la sensorialité et à l’alimentation. Le monde occidental contemporain a été bâti sur les hydrocarbures et les possibilités de transformation industrielle, économique, voire culturelle et politique, offertes par ces combustibles à haute valeur énergétique, dont les coûts de production et de distribution sont relativement bas. Ces hydrocarbures sont au cœur des systèmes énergétiques mondiaux et représentent jusqu’à 80 % de l’approvisionnement total en énergie primaire (IEA 2017). Bien que dans des proportions différentes de celles d’aujourd’hui, les projections mondiales pour 2040 placent toujours le pétrole, le gaz naturel et leurs dérivés au centre de la consommation d’énergie. Dans les trois scénarii développés par le World Energy Outlook (2017) de l’IEA (International Energy Agency), les combustibles fossiles continuent à représenter la source d’énergie la plus importante (voir le tableau 1 et IEA 2017 : 79). 

Tableau 1. Part des combustibles fossiles dans la demande totale en énergie primaire (2025, 2040) 

Niveau actuel 

Scénario 1

Politiques actuelles 

Scénario 2 (le plus ambitieux) Développement durable

2016 : 81 % 

 2025 : 80 % 

2040 : 79 % 

 2025 : 77 % 

2040 : 61 % 

Source : IEA, World Energy Outlook 2017: 79. 

Les émissions liées à la production et à la consommation d’énergie constituent la plus grande source de pollution, et ce, alors même que les émissions d’origines non énergétiques issues de l’agriculture et l’artificialisation des sols sont suffisantes pour provoquer des dommages durables au climat (IPCC 2018).

Les partisans d’une transformation radicale et rapide des systèmes énergétiques estiment abordables les coûts globaux de la transition énergétique. Dans le cadre de cette transition mondiale qui aurait 66 % de chances de maintenir les températures du XXIe siècle, au-dessus de 2 °C de celles constatées actuellement, le doublement des investissements pour lutter contre le réchauffement climatique entre 2015 et 2050 s’élèverait à 3 500 milliards de dollars, soit 0,3 % du PIB mondial en 2050 (OCDE/IRENA 2017 : 8). Parallèlement, les actifs immobilisés (stranded assets) dans le monde, destinés au pétrole et au gaz sont estimés à 520milliards USD (OCDE/IRENA 2017 : 111). Ainsi, la disparition de l’usage du pétrole s’avère une menace pour le capitalisme.

Jusqu’à présent, chaque transition énergétique s’est traduite par le remplacement par des combustibles énergétiques plus compacts. À l’ère industrielle, le charbon a remplacé la force animale et humaine pour le transport et la transformation de matières primaires. Par la suite, le gaz et le pétrole sont venus remplacer le charbon et ce faisant, ont sauvé les baleines, utilisées au XIXe siècle comme ressource en graisse destinée à la combustion. La transition énergétique actuelle est la première « inversée »3. Les nouvelles sources de productions de l’énergie, le vent et les radiations solaires ne peuvent pas stocker leur production. Ces énergies dites renouvelables permettent d’effectuer des économies de production, mais le bilan est contrebalancé par les émissions produites par le ciment, les mines et la sidérurgie destinés à la production des éoliennes, des panneaux solaires, des générateurs de marée, des batteries et par les infrastructures de transport.

Selon Mitchell, dans le chapitre « Carbon Democracy » (op. cit.), le pétrole est la base matérielle de la démocratie. Mouhot, dans sa contribution intitulée : « Past connections and present similarities in slave ownership and fossil fuel usage » (op. cit.), précise que l’énergie issue de combustibles fossiles a remplacé l’énergie humaine produite par les esclaves. Pour ces deux auteurs, consommation énergique et développement économique sont étroitement liés et sont nécessaires pour vaincre la pauvreté. En 2016, les pays économiquement les plus développés, qui représentent moins de 10 % de la population mondiale, disposaient d’un approvisionnement en énergie par habitant d’environ cinq tonnes d’équivalents pétrole (TEP). Cette offre par habitant peut être réduite à un peu moins de 4 TEP pour les pays plus développés, s’ils parviennent à mettre en œuvre des politiques de conservation plus ambitieuses, car la « démocratie, le capitalisme, la liberté des individus qui sont autant de valeurs fondamentales de la civilisation occidentale, peuvent-elles survivre sans le pétrole. » (IEA2017 : 66)

Dans sa contribution, Mitchell (op. cit.) montre que les relations de domination entre exploitants et exploités sont nées avec l’énergie et sont spécifiques à la structure économique qu’elle a générée. Du XIXe au XXe siècle, le pouvoir s’exerçait à travers le contrôle des mouvements des travailleurs de l’industrie charbonnière. Afin de limiter les revendications, les ouvriers œuvrant à l’extraction du charbon de ceux travaillant dans les transports ferroviaires et les ports ont été séparés. Le pétrole et le gaz, ainsi que leurs réseaux nationaux et internationaux de distribution, ont changé le jeu politique national en multipliant les sources des offres (nationales et internationales) tout en limitant les possibilités de captation des bénéfices par les groupes d’intérêts nationaux ou locaux. Lorsque l’État faiblit, le pétrole devient la raison de violents conflits politiques qui supplantent l’État lui-même, comme c’est le cas au Nigéria, comme le montre Michael Watts, dans sa contribution : « Imperial Oil : the anatomy of a Nigerian oil insurgency » (p. 219-235). 

Le pétrole est donc une métonymie du pouvoir. À travers le concept d’energopower, Boyer dans son chapitre intitulé : « Energopower : an introduction » (p. 184-204), cherche à produire une « généalogie du pouvoir moderne pour repenser le pouvoir politique à travers la double analyse de l’électricité et du carburant »4 (p. 197). Son objectif est de comprendre comment se sont institués les systèmes de domination actuels liés à l’énergie et leurs effets. En Occident, l’abondance matérielle et les ressources intellectuelles et scientifiques sont utilisées par les états pour alimenter les rapports de pouvoir. Les États-Unis en sont un exemple archétypal. Comme le souligne Szeman dans « System failure: oil, futurity and the anticipation of disaster » (p. 55-70), il est impossible d’en comprendre la stratégie géopolitique, menée depuis ces dernières décennies, sans prendre en compte l’énergie.

Les rapports de domination sont également présents au sein des états nations, comme en témoigne le mouvement des gilets jaunes en France. Ce mouvement, né du refus d’endosser une part disproportionnée du poids économique de la politique de transition énergétique, a popularisé le dilemme de « la fin du mois » contre « la fin du monde » (Foessel 2018). Au Mexique, un gouvernement de gauche a quant à lui lancé une croisade contre les milliers de citoyens qui vivent du vol et de la vente illégale de carburant (Agren 2019). Le pouvoir politique peut aussi être porteur de promesses. Le Canada, par exemple, est en train de développer de nouvelles formes de rencontres culturelles à travers des projets énergétiques de production propre, ou d’accès à distance au-delà des systèmes provinciaux. Ces projets se caractérisent par la coexistence d’une épistémologie occidentale et de savoirs autochtones (Henderson 2019). La dimension holistique de ces projets propose une relation intuitive et respectueuse à la nature — aspects qui commencent à être scientifiquement valorisés (Barnhardt 2005) — sont indispensables à la mise en œuvre des politiques de gestion des forêts, de l’eau, de l’énergie, notamment dans le contexte du changement climatique (Ford et al. 2016). Les réflexions autour de la prise en compte de la nature comme entité juridique et les nouvelles formes de gestion témoignent d’une décentration féconde dans le domaine de l’énergie. 

La vie humaine, toujours en réseau

Les réseaux de distribution de l’énergie examinés dans l’anthologie représentent une autre dimension des énergopouvoirs, par leur puissance propre et parce qu’ils sont inter-reliés à d’autres réseaux — l’eau, des personnes, des biens ou des informations — destinés à assurer le bon fonctionnement de l’économie. Les hydrocarbures nécessitent des infrastructures de transport lourdes et coûteuses (chemins de fer, pipelines, réseau électrique) que les nations économiquement développées ont achevé de déployer il y a plus d’un demi-siècle et qui continuent de générer des profits à leurs propriétaires publics et privés (Clifton et al. 2007).  

Le miracle productif de l’économie politique contemporaine consiste à utiliser la technologie pour intégrer les flux de marchandises, créer des marchés et promouvoir la spécialisation et les économies d’échelle. Or, dans l’ensemble des flux énergétiques, les réseaux formés depuis la révolution industrielle ont remplacé les réseaux d’extraction de ressources (le réseau agricole) et sont porteurs de pollution liés à leur production, la combustion et l’échange de biens non réutilisables. 

Comme le mentionne Mitchell (op. cit.), les réseaux peuvent être appréhendés au travers des relations de pouvoir entre nations, groupes sociaux et pouvoirs publics. Contrôler les liens reliant producteurs et consommateurs, c’est contrôler la distribution des flux. Pour Isabelle Garabuau-Moussaoui : « il faut montrer comment la mobilisation du sens individuel est encastrée dans des rapports de pouvoir collectifs, des contraintes matérielles, des institutions et donc quelles sont les marges de manœuvre dans lesquelles il peut mobiliser du sens, de l’imaginaire et de l’émotion par rapport à ses pratiques » (Garabuau-Moussaoui 2010 : 13).

Rendre visibles ces infrastructures construites pour être cachées — qu’il s’agisse de canaux d’irrigation, d’aqueducs, d’oléoducs ou de gazoducs — est l’objet du travail d’Ursula Bielmann (artiste) et Andrew Pendakis (chercheur) : « This is not a pipeline : thoughts on the politico-aesthetics of oil » (p. 504-511), qui mobilisent des ressources tant iconographiques que vidéographiques. À propos d’une barrière construite de façon improvisée au Bangladesh pour protéger les populations contre les inondations, Bielmann et Pendakis (op. cit.) notent que « si nous devons parler du monde non humain — modèles de temps, polluants organiques, atomes de cuivre — il ne suffira pas de déployer un discours anthropocentrique. Tout ne naît pas d’une intention humaine ; nous devons examiner la manière dont les réalités humaines et non humaines émergent ensemble dans une variété de formations » (p. 511). Ce qu’elle qualifie de non-humain est ici une conséquence de l’action humaine qu’il est nécessaire de rendre visible. Un autre projet de Bielmann se concentre sur le Nil, autour de l’un des plus amples réseaux d’irrigation au monde. Rendre visibles les réseaux permet une mise en lumière de la matérialité des relations sociales autour de l’énergie.

Humanisme, thermodynamique, et l’idée de l’économie circulaire

Katz-Rosene et Paterson (2018 : 19) rappellent que, quelques années avant la crise pétrolière de 1973, Nicolas Georgescu-Roegen, dans son ouvrage The Entropy Law and the Economic Process (1971), proposait de fusionner économie et physique en un paradigme centré sur les lois de la thermodynamique. Georgescu-Roegen considère que les processus économiques ayant un impact sur les ressources naturelles, qu’ils soient induits ou non par les institutions et les politiques publiques, sont examinés comme des flux d’énergie dans le système planétaire qui est lui-même un système fermé. La première loi de la thermodynamique dit que l’énergie n’est pas créée ou détruite, mais transformée. La seconde loi, plus importante pour comprendre la situation actuelle, indique que tous les processus physiques maintiennent une tendance au désordre ou à la dissipation de l’énergie.  

La relation entre l’énergie et la culture, comprise comme des activités et des valeurs économiques et morales, est un thème développé par plusieurs auteurs de cette anthologie notamment Chakrabarty (op. cit.) ; Szeman (p. op. cit.) ; Scheer (p. 97-106) ; Stoekl (p. 323-338). Selon Allan Stoekl, dans son chapitre intitulé : « Bataille’s ethics », « L’homme n’est pas tant l’auteur de son propre récit [...] qu’il est le point central de l’intensification ou de l’affaiblissement des flux d’énergie. » (p. 323). À propos de La part maudite de Georges Bataille (1949), Stoekl note que cet auteur y propose une utopie qui dépasse les fondements de la retenue et des dépenses, fondements qui caractérisent toutes les civilisations et alignent l’économie aux lois de la thermodynamique. Selon cet auteur encore, et en accord avec la deuxième loi de la thermodynamique, le paradoxe est que notre civilisation est condamnée à se replier, malgré ses efforts pour conserver les ressources et l’énergie. Il note que tandis que la civilisation cherche à préserver la vie et se nourrit de la transformation et de l’épargne pour se développer (et dépenser), l’éthique utopique de Bataille est bâtie sur l’érotisme, c’est-à-dire l’approbation de la vie jusque dans la mort, et la transgression. On peut se demander pourquoi prendre Bataille (ibid.) ou Stoekl (ibid.) au sérieux si leur proposition est technologiquement ou socialement intenable. Une réponse réaliste pourrait être qu’un des rôles de l’imagination dans la culture est précisément de révéler les limites de ce qui est physiquement possible. L’imagination et la transgression deviennent alors une proposition pour appréhender le réel, le matériel et le figuratif et, ce faisant, aider à comprendre le monde, car « en tant que possible, l’intention utopique est de défier et de transformer l’ordre présent » (Taylor 1997 : 9).  

Que faire ?

L’économie circulaire est un concept qui s’est imposé pour réguler et planifier le futur immédiat. L’objectif est de multiplier les possibilités de réutilisation des matières premières et des déchets pour générer des activités qui produisent ou transmettent de la valeur économique (Cooper et al. 2017 ; Viniegra 2018). Toutefois, comme pour la transition vers des carburants plus propres, le passage à l’économie circulaire est fondé sur des hypothèses, des risques et des coûts non prouvés (Korhonen et al. 2018, Pelorosso et al. 2017). Les nations qui possèdent des ressources organisationnelles économiques, politiques et administratives pour s’adapter rapidement au changement climatique sont rares, alors que se multiplient les crises liées à une immigration qui est directement ou indirectement le résultat du stress des ressources aquifères et de ses répercussions sur l’agriculture (UNFCCC 2018). La menace de conflits et de violence qui résulte de ces crises imprègne les textes d’un sentiment de défaite. 

Pour Chakrabarty (op. cit.), face à la catastrophe écologique, à l’impossibilité d’une histoire universelle et d’un récit d’émancipation, il reste une « histoire universelle négative » (p. 50), c’est-à-dire, une reconnaissance de l’espèce comme sujet commun de destruction plutôt que comme facteur de construction ou d’émancipation. 

Tout cela donne une image de désespoir présente dans la dystopie d’Oreskes et Conway : « The Frenzy of fossil fuels » (p.107-119). Ces chercheurs en sciences sociales ont par ailleurs dévoilé les manœuvres des grandes compagnies pétrolières et de tabac pour semer la confusion dans la science au sujet des changements climatiques et des maladies pulmonaires (Oreskes et Conway 2011).

Au final, on peut déplorer que la question de la responsabilité ne soit pas plus saillante dans ce recueil d’essais. Les contours de la discussion sont jalonnés de repères trop éloignés les uns des autres pour créer un dialogue pertinent avec d’un côté, les espoirs de transformation technologique tièdement embrassés par Atwood (op. cit.) et de l’autre, la stricte éthique de la compassion individuelle prônée par Jamieson (op. cit.). Entre ces deux pôles, les nombreux témoignages de critiques historiques et philosophiques fragilisent un peu plus la confiance que l’on peut avoir en la civilisation pour se corriger. 

L’attention des humanistes devrait se concentrer sur ce que l’on peut et doit attendre de l’homme, en tant qu’agent politique. Plus fondamentalement, en suivant les travaux de Hannah Arendt (1958) sur la condition humaine, il convient de se demander quelles organisations politiques, quels idéaux et valeurs civiques peuvent renforcer la capacité humaine à agir et à transformer délibérément le monde sans le subordonner à la technologie et à l’économie. S’il n’est pas possible ici d’établir les lignes directrices d’une discussion philosophique ou d’une exploration sociale de ces valeurs, il est nécessaire de souligner sa nécessité et la relative absence de cet aspect dans l’ouvrage.

1 Voir à ce propos l’introduction et le compte rendu critique d’Étienne Bourel dans ce même numéro.

2 Les hyperobjects sont définis par T. Morton comme des entités contenues dans une étendue spatio-temporelle telle qu’elles mettent en faillite l’idée

3 La transition vers des combustibles moins compacts est difficile à réaliser. En effet, le pétrole et le charbon ont un contenu calorique supérieur à

4 Traduction de l’auteur.

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1 Voir à ce propos l’introduction et le compte rendu critique d’Étienne Bourel dans ce même numéro.

2 Les hyperobjects sont définis par T. Morton comme des entités contenues dans une étendue spatio-temporelle telle qu’elles mettent en faillite l’idée même que nous nous faisons d’un objet.

3 La transition vers des combustibles moins compacts est difficile à réaliser. En effet, le pétrole et le charbon ont un contenu calorique supérieur à celui des énergies renouvelables comme l’éolien ou le solaire. Le pétrole, par exemple, nécessite des infrastructures de transformation complexes, qui rendent cependant cette ressource utilisable dans tout type de secteur : résidentiel, industriel, etc. Même s’il pollue, le pétrole reste rentable d’un point de vue économique et transportable et stockable aisément. C’est d’ailleurs en raison de ces facilités offertes par le pétrole que nos besoins en énergie ont augmenté. Le grand défi auquel sont confrontées les énergies renouvelables est, précisément, le contenu calorique, le stockage et le transport. Leur technologie doit donc être développée pour produire à grande échelle. La progression « inverse » qui permettra la transition renvoie à des infrastructures plus grandes permettant de produire et de consommer la même quantité d’énergie. À terme, des technologies comme l’hydrogène pourraient se substituer au pétrole, mais rien n’est encore certain.

4 Traduction de l’auteur.

Rafael Armando Aguirre Ponce

Rafael Aguirre est candidat au doctorat en administration publique à l’École d’études politiques de l’Université d’Ottawa. Il s’intéresse à la réglementation et au commerce des ressources énergétiques (pétrole et gaz naturel) en Amérique du Nord, et sa thèse de doctorat porte sur l’évolution des politiques dans le secteur du gaz naturel au Mexique. Rafael Aguirre a mené des recherches sur les relations énergétiques canado-américaines, sur l’aspect politique du processus décisionnel touchant les pipelines sous l’optique du fédéralisme au Canada, sur l’acceptation sociale des projets d’infrastructures énergétiques et sur la littératie énergétique.